December 1999 Volume 3 numéro 6
La résistance - peut-on y faire face?

Le Dr Otto Radostits, du Western College of Veterinary Medicine, de l’Université de Saskatchewan, a rédigé un sommaire de la conférence, qui a eu lieu à Toronto, sur la
"gestion de la résistance antimicrobienne".

Objectifs de la conférence

Cette conférence avait pour mission de faire connaître :

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L’ampleur de la situation

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L’impact de la résistance antimicrobienne sur la gestion de la santé

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La réglementation relative à la résistance antimicrobienne

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Les mesures éducatives et les stratégies de gestion de la résistance antimicrobienne

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L’aspect commercial lié à la résistance antimicrobienne

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Les pratiques agricoles pouvant réduire la résistance antimicrobienne dans la production des aliments

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Les programmes de surveillance et la cueillette des données

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Le rôle politique de la réglementation sur la gestion de la résistance antimicrobienne

La résistance antimicrobienne a des répercussions sur la santé humaine et animale.

La conférence cherchait à cerner le rôle de l’agriculture dans la gestion de la résistance antimicrobienne en répondant à ces questions :

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Comment l’agriculture suscite-elle la résistance antimicrobienne ?

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Quel en est l’impact sur la santé humaine et animale ?

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Quelle stratégie faut-il envisager pour faire face à ces interrogations ?


Sommaire de la conférence et recommandations

La résistance antimicrobienne est un problème majeur en médecine humaine parce que les antimicrobiens sont fréquemment utilisés. La situation est inquiétante pour les patients hospitalisés avec des maladies comorbides et les patients dans les unités de soins postopératoires
qui sont vulnérables aux infections résistantes aux antimicrobiens.

Les lignées de bactéries résistantes aux antimicrobiens sont en voie d’expansion parce que les antimicrobiens sont suremployés. Les professionnels de la santé humaine s’entendent pour dire qu’il faut réduire le nombre de prescriptions aux cas indispensables.

Par contre, à l’exception de quelques cas de bactéries entériques, la résistance antimicrobienne en médecine vétérinaire ne manifeste pas de problème chez les animaux destinés à l’alimentation. Cependant, les méthodes, qui servent à détecter la sensibilité et la résistance des bactéries pathogènes chez les humains et les animaux, varient d’un pays à l’autre et prêtent à confusion quand on explique le phénomène.

On a supposé que les antimicrobiens incorporés en doses sous-thérapeutiques dans la nourriture des animaux destinés à l’alimentation devaient susciter la résistance antimicrobienne en médecine humaine à cause de l’émergence, dans l’organisme animal, de bactéries résistantes. Ces dernières seraient transmises aux humains, pouvant causer des maladies graves, mais difficiles à traiter à cause de la résistance antimicrobienne. Les scientifiques font des recherches,depuis trente ans déjà, dans le but de vérifier la prémisse d’un lien direct, et concluent que le rapport de cause à effets ne peut être ni prouvé ni réfuté.

Alors qu’il y a similarités entre les écosystèmes humain et animal, et qu’il est biologiquement possible, voire plausible, qu’une transmission de bactéries s’opère, et affecte la santé de l’humain, on estime toutefois que l’incidence ne peut être que minime.

Il arrive souvent que les médias sèment la panique chez les consommateurs à propos de la sécurité des viandes et des volailles. Et pourtant, il ne fait aucun doute que l’empoisonnement alimentaire est un problème sérieux causé par un manque d’hygiène dans la manipulation des
viandes et des volailles, et d’une cuisson insuffisance.

Chaque membre devrait avoir à coeur d’engager le dialogue pour que la problématique de la résistance antimicrobienne soit correctement comprise.

La résistance antimicrobienne est inévitable quand on utilise des antimicrobiens; c’est pourquoi l’observation des règles de prudence est d’ordre prioritaire. Les médecins et les vétérinaires doivent connaître tous les aspects de la question et s’en remettre à une pratique
thérapeutique réfléchie. Les producteurs, aussi, doivent se renseigner sur les mesures à observer quand on administre des antimicrobiens aux animaux. De plus, il faut que notre procédure assure que toutes nos décisions soient prises sur une base scientifique. Et il importe que la procédure d’approbation actuelle soit révisée pour éliminer tout délai et obstacle inutiles qui augmentent le coût de développement des produits.

Il faut avoir le courage de répondre à ces questions :

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Est-il bénéfique, économiquement, d’utiliser des antimicrobiens pour activer la croissance dans le contexte actuel des modes modernes de production?

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Les antimicrobiens, utilisés en doses sous-thérapeutiques comme agent de croissance dans la production des animaux destinés à l’alimentation, suscitent-ils l’émergence de bactéries résistantes aux antimicrobiens qui une fois transmises aux humains peuvent causer des maladies graves et difficiles à soigner ?

Certains pays ont proscrit l’utilisation des antimicrobiens comme agent de croissance.

Selon leurs scientifiques, les résultats actuels démontrent que la résistance antimicrobienne des bactéries pathogènes résidant dans les organismes humain et animal dérive de l’utilisation sous-thérapeutique des antimicrobiens en agriculture animale. Toutefois, cette position n’est pas soutenue par des preuves de cause à effets, et le principe de la sécurité a été évoqué pour justifier l’interdiction. Il est possible que certaines décisions politiques sont prises à cause de l’incertitude de la science à ce sujet. L’identification et l’analyse des risques sont nécessaires pour les décideurs politiques.

L’utilisation sous-thérapeutique des antimicrobiens devrait faire l’objet de programmes nationaux de surveillance, et la résistance antimicrobienne de certaines bactéries vivant chez les animaux, qui sont destinés à l’alimentation et exposés aux antimicrobiens, devrait être suivie dans des troupeaux sentinelles.

Il faut inciter les gouvernements à déclarer publiquement qu’ils considèrent comme prioritaires les programmes de surveillance de la résistance antimicrobienne chez les animaux destinés à l’alimentation car le rôle de l’agriculture dans le phénomène de la résistance antimicrobienne en médecine humaine doit être identifié avec plus de précision.

Il faut que Santé Canada, division sécurité des aliments, joue un rôle de leader dans cette sphère d’activités qui devrait inclure tous les empoisonnements alimentaires.

Il faut inciter les gouvernements à investir dans la recherche sur la santé animale parce que l’alimentation fait partie des besoins essentiels de l’être humain.

Il faut que des programmes de surveillance soient implantés dans tout le pays pour que des cultures bactériennes soient recueillies, de façon systématique, chez les animaux sains et malades, afin d’en mesurer la sensibilité aux antimicrobiens.

Il faut que les laboratoires remettent les diagnostics aux producteurs pour que des mesures rationnelles soient toujours associées à l’utilisation des antimicrobiens, y compris l’identification et le dossier médical de chaque animal. Les consommateurs sont de plus en plus soucieux des risques associés à l’alimentation et souhaitent un haut standard de sécurité. Leur perception est notre réalité.

Nous devons relever le défi d’éduquer le public sur la sécurité des aliments là où l’information est précise et disponible. L’irradiation des viandes fraîches, (boeuf, porc, volaille), sera introduite sous peu dans les usines de transformation. Cette technologie peut nous procurer des aliments exempts de bactéries, qui seront sains et nutritifs, et va réduire l’incidence d’empoisonnements aux colibacilles 0157h:7, à la salmonelle et aux campylobactéries. Mais certaines viandes, préparées chez le détaillant (viande hachée), vont toujours comporter des risques de contamination.

L’agriculture animale est appeler à se transformer aussi longtemps qu’elle sera intégrée au libre marché mondial, et que la politique des bas prix prévaudra. L’industrie de l’alimentation animale explore de nouveaux modes de production en vue de réduire la dépendance sur les antimicrobiens comme moyen d’éliminer les maladies bactériennes et comme agent de croissance. L’élimination des maladies infectieuses chez les animaux destinés à l’alimentation est au coeur de la problématique, et on ne peut banaliser le facteur d’efficacité dans la gestion de la santé et la productivité.

Le rapport entre la résistance antimicrobienne en médecine humaine et l’utilisation des antimicrobiens dans la production des animaux destinés à l’alimentation est complexe, et le problème requiert l’implication bien orchestrée de tous ceux qui veulent aller de l’avant et trouver des solutions efficaces et économiques.

Une séance supplémentaire s’est déroulée durant la conférence pour traiter du rapport entre l’utilisation des antimicrobiens dans la production animale et l’émergence de la résistance antimicrobienne. Pour en savoir davantage à ce sujet, contactez
le bureau de l’ICSA.

Pour tout renseignement concernant cet article, n’hésitez pas à contacter le Dr Radostits :
tél. 306-966-7153;
fax 306-966-7174;
courriel:
Otto.Radostits@usask.ca